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Partage de nos voyages en famille en Mongolie centrale, en Equateur, en Aragon (Espagne), en Islande, au Myanmar

06 Jul

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

Publié par Picpic70

    Petit déjeuner au calme sur le belvédère bordant le fleuve. De jeunes enfants partent à l'école en pirogue, sac en bandoulière, tandis qu'un lézard curieux nous observe depuis le haut de la clôture de bois. La terrasse est délimitée par un empilement géométrique de jarres de terre cuite, je trouve de très bon goût cette utilisation atypique de l'artisanat local.

Myanmar, 26/10/2017 : BaganMyanmar, 26/10/2017 : Bagan
Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Nous reprenons le chemin de terre emprunté hier en sens inverse, je me réjouis déjà des tranches de vie que je vais pouvoir observer. Nous sommes le matin, c'est de toute évidence l'heure de pointe … des zébus, qui sont tous de sortie pour aller travailler ou se rendre au pâturage. Nous croisons ainsi ou dépassons une bonne douzaine de troupeaux d'une cinquantaine de têtes chacun. La lumière est suave, la campagne est paisible, les paysans sont en plein labeur.

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan
Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Un accident de la route, heureusement sans gravité, vient animer notre progression cahoteuse sur cette piste semée d'ornières. Alors qu'il se range sur le bord pour nous laisser passer, un motocycliste heurte une brique et chute lourdement à terre. Il se relève bien vite avec le sourire, mais se frotte quand même les côtes durant quelques minutes … 

 

   Quelques heures plus tard, nous reprenons contact avec la civilisation. Encore une fois, le flegme birman m'ébahit : lors d'un dépassement ou d'un croisement difficile, le conducteur le plus pressé (ou le plus téméraire) s'engage en klaxonnant et les autres automobilistes le laissent passer, sans râler ni s'énerver. Si un scooter mal garé gêne la circulation, personne ne s'énerve : soit le motocycliste arrive et déplace son deux-roues, soit il ne se manifeste pas et le conducteur de la voiture descend de son véhicule, enlève le scooter du milieu puis repart, sans crier ni ronchonner. Puissent les automobilistes des grandes villes de France en prendre exemple … 

 

    Une pause sur un marché local m'apporte une bouffée de fraicheur et de couleurs. L'endroit est animé et déborde de vie et d'odeurs, j'ai envie de tout goûter, de tout voir, de tout ressentir … Des balances à l'ancienne gèrent les transactions dans ce joli capharnaüm où les piments côtoient les bananes et les cornichons, et où les statuettes sacrées s'alignent, telles une armée de soldats impassibles indifférents à la foule qui circule. Du riz, des fruits, des légumes de toutes sortes, des aromates, des épices, des noix de bétel, du poisson, de la viande, des vêtements, des figurines : on trouve de tout sur ce lieu de rencontres au cœur de la vie sociale des habitants.

 

Myanmar, 26/10/2017 : BaganMyanmar, 26/10/2017 : BaganMyanmar, 26/10/2017 : Bagan
Myanmar, 26/10/2017 : BaganMyanmar, 26/10/2017 : Bagan
Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Se faufilant adroitement au milieu des échoppes, Win nous conduit au milieu des étals de tissus et vêtements. Il incite Christian à se vêtir localement, et commence alors une séance de shopping masculin non dénuée  de charme. Assisté de Win, Christian choisit le motif de son longyi, puis vient l'apprentissage de la façon si particulière de le nouer afin d'obtenir un résultat esthétique et fonctionnel. La vendeuse rigole bien, je ne suis pas certaine qu'elle ait déjà habillé beaucoup d'européens … Très concentré, Christian parvient finalement à un résultat très honorable, pour un peu, je le trouverais presque super sexy dans son longyi à carreaux !

Myanmar, 26/10/2017 : BaganMyanmar, 26/10/2017 : Bagan
Myanmar, 26/10/2017 : Bagan
Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    En début d'après-midi, nous atteignons enfin notre destination, le fantastique site archéologique de Bagan. Cette zone de 40 km2 abrite non moins de 2000 temples et stupas, dans un état de préservation très variable de l'un à l'autre. Certains sont très bien conservés, d'autres sont en ruine, d'autres sont en cours de restauration et d'autres, enfin, ont disparu, détruits par le temps, les précipitations et les tremblements de terre. D'aucuns sont immenses, d'autres ne mesurent que quelques mètres carrés, ils sont bâtis en grès pour les uns, en brique de terre pour les autres, parfois en bois. Edifiées entre le XIème et le XIIIème siècle, ces pagodes, témoignages de la ferveur du temps passé, étaient plus de 12000 à l'origine. Les siècles ont eu raison de bon nombre d'entre elles mais malgré cela, leur concentration actuelle sur le site de Bagan reste encore faramineuse !

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Chaque édifice a son charme, mais leur force tient surtout dans leur nombre. Où que se porte mon regard, il rencontre plusieurs de ces constructions vieilles de presque un millénaire ! Impossible de faire plus émouvant, que ce soit sur le plan historique, architectural, esthétique ou symbolique. Certaines s'élèvent, altières, au dessus de la canopée, d'autres se fondent dans la végétation et se dissimulent timidement aux regards.

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Le spectacle est indescriptible, tellement riche en émotions que j'en ai des frissons lorsque mes yeux balayent l'immense plaine. Les murs de brique semblent habités d'une énergie ancestrale évoluant de façon imperceptible au fil des siècles. L'usure fait son œuvre, uniformisant petit à petit les couleurs autrefois éclatantes des fresques murales, écaillant les stucs recouvrant les murs et les statues, érodant le mortier unissant les briques ; les murs extérieurs, originellement rouges, se recouvrent peu à peu d'une pellicule noirâtre de lichens et de poussières. La végétation environnante, stimulée par le climat tropical et la mousson annuelle, reprend peu à peu ses droits et grignote le moindre espace vacant. Le minéral, longtemps invaincu, courbe l'échine et cède centimètre par centimètre du terrain au végétal, année après année, siècle après siècle. La fureur des éléments s'en mêle parfois, ainsi des vents violents ou des pluies diluviennes finissent par achever le travail de sape entamé par le temps, effritant définitivement un mur déjà bien affaibli ou renversant un dôme autrefois fièrement dressé vers les cieux. Les nombreux séismes subis par le pays n'ont pas arrangé les choses, réduisant à néant en quelques instants plusieurs décennies de travail et plusieurs siècles d'existence. Certains temples ont disparu à jamais lors de ces tremblements de terre, rejoignant au sol la terre dont l'Homme les avait extraits, certains autres résistent encore vaillamment mais gardent les stigmates  des ces secousses dévastatrices sous la forme de fissures ou de portions écroulées.

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan
Myanmar, 26/10/2017 : Bagan
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Myanmar, 26/10/2017 : BaganMyanmar, 26/10/2017 : BaganMyanmar, 26/10/2017 : Bagan
Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    La montée sur une butte qui me permet d'embrasser du regard le fleuve, la plaine et les innombrables pagodes qui la parsèment me serre la gorge tellement le spectacle est grandiose. De toutes parts les temples et stupas émergent de la végétation d'un vert profond ragaillardi par la mousson qui se termine. Quelle beauté, quel bonheur … 

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Pour visiter cette vaste étendue, nous avons choisi un mode de transport pratique et très fun : le scooter électrique. Après quelques explications sur la conduite de ces engins, nous enfourchons nos montures parfaitement silencieuses et nous nous lançons à l'assaut des routes de la plaine de Bagan, cheveux au vent… Un casque ? Quel casque ? Nous n'en avons pas demandé, et d'ailleurs, personne ne nous en a proposé … Est-ce vraiment raisonnable ? C'est certain que non ! Est-ce vraiment dangereux ? Probablement un peu, mais heureusement, la circulation n'est pas trop dense sur ces routes et nous faisons bon usage du klaxon. Emilie est assise derrière Christian car elle a jugé que le scooter était trop lourd pour qu'elle se sente capable de le manier correctement, et Mathilde et moi avons chacune notre véhicule électrique. Nous filons bon train, zigzagant entre les temples, évitant les ornières, cornant à qui mieux mieux pour signaler notre position. Je m'éclate clairement, et je pense que ce bonheur simple peut se mesurer au nombre de moustiques collés sur mes dents à l'arrivée car je ne me suis pas départie d'un immense sourire de toute l'après-midi. Certes, ce n'est pas comparable à l'émotion intense et profonde engendrée par la beauté de la plaine de Bagan, mais c'est tout de même un pur moment de bonheur familial.

Myanmar, 26/10/2017 : BaganMyanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Christian, Mathilde et Emilie ne sont d'ailleurs pas en reste, je crois que ce moyen de locomotion silencieux, rapide et ludique a conquis toute la famille ! J'en profite pour signaler au passage à Mathilde que c'est la première, et sans aucun doute la dernière fois qu'elle fera du scooter ou de la moto sans casque avec mon autorisation. Quant à moi, je me suis surprise moi-même ; habituellement plutôt tatillonne sur les questions de sécurité, je ne pensais pas être capable d'oublier que je ne portais pas de casque sur un scooter roulant à 40 km/h sur une route cabossée du bout du Monde. Soit je m'assouplis un peu en vieillissant, soit il s'agit peut-être de l'attrait de l'interdit … A ne pas imiter ni reproduire, bien sûr !

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan
Myanmar, 26/10/2017 : BaganMyanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Au détour d'un chemin, je découvre deux chars à zébus transportant chacun une paire de touristes. Les bêtes sont magnifiques, leur robe claire est parée d'atours colorés et leur bosse est gigantesque. Les paisibles bovidés avancent d'un pas régulier et assuré, fiers de leur prestance ; lorsqu'ils passent à mes côtés, je reçois comme un cadeau l'énergie de force tranquille qu'ils dégagent. Des clochettes attachées à leurs traits d'attelage émettent de petits tintements à chaque pas, sons cristallins qui viennent égayer le bruit métallique des roues cerclées de fer sur le chemin caillouteux. Nonobstant la présence des touristes sur les chars, cette vision me transporte dans un autre univers et reste gravée dans ma mémoire, tant sur le plan visuel qu'auditif, comme un grand moment de paix et de beauté.

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Nos scooters nous mènent d'une pagode à l'autre, du plus petit stupa camouflé au cœur de la végétation et déjà bien altéré par les affres du temps jusqu'au plus majestueux des temples accueillant chaque jour des milliers de fidèles et de touristes. Les uns n'ont comme compagnie que le chant des oiseaux et le bruissement des feuilles, les autres sont habités par un brouhaha permanent engendré par la foule qui défile. Dans l'enceinte de l'un d'entre eux, une femme girafe tisse une écharpe, indifférente aux touristes qui l'observent et la photographient. Sa joue est déformée par l'inévitable chique de bétel, je lui trouve un air à la fois hautain et mélancolique. Je ne peux m'empêcher de me demander si la pose de ses anneaux cervicaux a été réalisée dans le seul but de perpétuer une tradition ancestrale ou si elle a été motivée par un intérêt bien plus matérialiste … Cette rencontre fugace me laisse un goût doux-amer, par ma seule présence j'ai pendant un instant l'impression d'être complice, voire responsable de sa mutilation.

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Heureusement, non loin de là, une armée de marionnettes suspendues aux branches basses d'un arbre me redonne le sourire, tandis que la découverte d'un petit bouquet de fleurs des champs déposé en offrande aux pieds d'un Bouddha me ravit par sa simplicité et sa sincérité. La perfection n'a pas besoin d'artifices … 

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Pour clôturer en beauté cette journée hors du commun, Win nous emmène assister au coucher de soleil depuis le sommet d'une pagode. Tandis que l'astre solaire descend lentement dans le ciel, les temples les plus éloignés semble peu à peu frappés d'évanescence. Le paysage devient fumeux, l'azur devient pourpre, les temples disparaissent dans la lumière déclinante. 

Myanmar, 26/10/2017 : BaganMyanmar, 26/10/2017 : Bagan

   Une libellule tutoie les sommets, fragile silhouette à l'assaut des géants de pierre. L'instant est magique … 

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Un nuage farceur décide de nous ravir au dernier moment la vision de l'astre nimbé de pourpre. Pudique, le soleil se cache derrière son nébuleux paravent pour disparaître à l'horizon, auréolé de mystère … 

Myanmar, 26/10/2017 : Bagan

    Au repas du soir, à l'hôtel, nous battons notre record côté prix. Nous buvons chacun un apéro et mangeons largement à notre faim pour l'équivalent de 4 € par personne. Tient, cela me rappelle que, pris dans le tourbillon de la journée, nous n'avons pas pris le temps de manger à midi ! Win nous l'a bien proposé, mais il y avait tellement de choses bien plus intéressantes à faire que cela nous est finalement complètement sorti de l'esprit !

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